Depuis le printemps, j’ai l’impression de jouer à « Jacques a dit », ou plutôt « Manu a dit ».
Le mercredi, Manu a dit : « Sortez, allez au théâtre ».
Le lendemain, Manu a dit : « On ferme les écoles ».
Puis Manu a dit : « Restez chez vous. »
Manu a aussi dit : « Pas de maques ».
Et après, Manu a dit : « Masques obligatoires ».
Manu a dit : « Sortez de chez vous. »
Cet été, Manu a dit : « Pouce ! Faites-nous confiance, on gère tout. »
Et le même jeu a repris cet automne.
Manu a dit : « Couvre-feu ».
Manu a dit : « On ferme les commerces. »
Manu a dit : « Re-confinement. »
Manu a dit : « Un kilomètre. »
Et maintenant, Manu nous dit « 25 kilomètres ».
Manu nous dit : « On rouvre les commerces. »
Manu nous dit : « Doucement, la vie reprend. »
Alors, on va jouer à « Manu a dit » jusque quand ? Jusqu’au prochain printemps ? Encore un an ?
A voir également :
« Telle la cigale vous avez chanté tout l’été, et soudain… confinement ! »
Les Français ne sont pas des enfants.
Nous sommes une République.
Nous sommes une démocratie.
Nous sommes des citoyens, des citoyens éclairés, des citoyens éduqués, et tous ces choix, pour notre santé, pour notre liberté, nous devons y être associés, même par temps de crise sanitaire, et je dirais même surtout par temps de crise sanitaire. Jean-François Delfraissy, le président du Conseil scientifique réclame depuis avril – je le cite – une « inclusion et participation de la société à la réponse au Covid-19 ». Le président de France Asso Santé s’exaspère : « Nous n’avons été associés ni au comité d’experts ni à la décision de confiner. » Et Chantal Jouanno qui préside la Commission débat public avertit « même en situation d’urgence, il y a moyen de faire participer les citoyens, surtout lorsque les décisions prises touchent aussi intimement à leurs libertés. » « Intimement », oui.
Car quand, quand, dans notre histoire, quand, je dirais même, quand dans l’histoire de l’Humanité, quand a-t-on interdit à des enfants de voir leurs parents, à des parents de voir leurs enfants ? De voir leurs cousins cousines, leurs oncles et tantes, leurs grands-parents ? Quand a-t-on rompu, à l’échelle de toute une nation, ce lien familial, ce lien charnel, le plus intime des liens ? Quand ? Jamais, il me semble.
Et là, un homme seul, là-haut, un homme seul, sans consulter, sans concerter, un homme seul, du jour au lendemain, un homme seul peut interdire à des enfants de voir leurs parents, à des parents de voir leurs enfants. Et le pire, peut-être, le faire comme une banalité, comme un ça va de soi, sans même énoncer une seule fois : « Parents, vous ne verrez plus vos enfants, enfants, vous ne verrez plus vos parents. » Une décision qu’Emmanuel Macron a prise au printemps, dans l’urgence. Une décision qu’Emmanuel Macron a prise, à nouveau, à l’automne, déjà comme une habitude, presque.
A voir également :
Vous mettez en sommeil la démocratie !
Ce mardi, donc, enfin, Manu a dit : « Vaccinez-vous. » Sauf que, cette fois, Manu s’étonne. Les Français sont méfiants. Hum hum. Alors, face à ce défi, le président a nommé une « Task Force Covid » – car nous ne sommes pas en guerre, « we are in war » et à la tête, donc, de cette « Task Force », Louis-Charles Viossat. Je ne connais pas. J’ai tapé son nom sur Google, et je vous propose de mener l’expérience avec moi. Prenez votre téléphone portable. Tapez « Louis-Charles Viossat LinkedIn ». Vous descendez sur la page. Que découvrez-vous ? « Government Affairs Senior Director, Western Europe & Canada/ EU », Abbott. Pour les non-bilingues : Chef des lobbyistes, dans un géant de l’industrie pharmaceutique Abbott. Là-bas, durant cinq années, il a – je cite – il a « lobbied ex-US governments », il était dans des « key national and international professional associations ».
Voilà donc, en toute transparence, en toute indépendance, qui est nommé Monsieur Vaccin : un énarque qui a pantouflé et rétro-pantouflé, un petit soldat de Big Pharma, ou plutôt un grand général des labos américains. Et c’est lui, donc, qui sera en charge, en France, de « dealer » avec Pfizer, AstroZeneca et autres Moderna…
Ca vous choque ou pas ? Plus rien ne vous choque. Ca vous paraît de nature à rétablir la confiance ? Mais comment en être surpris ? Où se réunissait le lobby des lobbies de la pharmacie, le Dolder, qui rassemble les quarante plus gros labos au monde. Où se tenait sa réunion annuelle le lundi 9 juillet 2018 ? A l’Elysée ! Oui, directement à l’Elysée ! Et tous les PDG dînaient avec le président… Sans rappeler, ici, les liens étroits, renouvelés, entre la Macronie et Sanofi.
A voir également :
Sanofi fusionne avec la Macronie !
Alors, alors, alors, le président a sorti un lapin de son chapeau mardi soir : « un collectif citoyen pour associer la population ». Après les Gilets jaunes, il avait lancé le Grand débat. Pour mieux se voir si beau dans ce miroir. Après Youth for Climate, il a inventé – car il est inventif, je ne lui retire pas ça – il a inventé la Convention citoyenne sur le climat. Pour mieux s’asseoir, aujourd’hui, sur ses 149 propositions. Et maintenant, voilà ce « collectif citoyen », ce machin, ce bidule, qui devra trouver son strapontin entre la Task Force, le Conseil scientifique et le Comité vaccin.
D’urgence, il nous faut en finir avec le « Manu a dit ».
D’urgence, il nous faut établir une véritable démocratie sanitaire.