« Une étude d’impact insuffisante… Des projections financières lacunaires… Un flou sur l’âge de départ à la retraite, sur le taux d’emploi des seniors, sur les dépenses d’assurance-chômage… » Ce n’est plus votre opposition qui le dit. C’est désormais l’avis, officiel, du Conseil d’Etat : vous faites n’importe quoi.
La plus haute juridiction française juge – je la cite – la « situation d’autant plus regrettable qu’il s’agit d’une réforme inédite depuis 1945 et destinée à transformer pour les décennies à venir l’une des composantes majeures du contrat social ». C’est ce contrat social qu’on joue à la roulette législative ! Les retraites, les retraites des Français, les retraites des millions de travailleurs, sont jetées dans une tombola improvisée.
Et pourquoi ? Parce que tel en est, à l’Elysée, le caprice du prince. Mais il est seul. Vous marchez seuls. Seuls contre la rue. Seuls contre les avocats et les hospitaliers, seuls contre les enseignants et les ouvriers, seuls contre les cheminots et les danseuses de l’Opéra. Seuls, ici, contre la droite, seuls contre la gauche. Seuls, surtout, contre les Français, seuls contre les deux tiers des salariés. Seuls contre les syndicats, et maintenant seuls contre le Conseil d’Etat ! Seuls, seuls, seuls.
Et c’est ainsi, retranchés dans vos palais, que vous prétendez réformer la France ? En faisant rentrer la loi à la matraque ? A coups de LBD ?
Puisque, comme d’habitude, vous applaudissez, puisque vous faites la claque en cadence, je voudrais m’adresser vous, chers collègues, chers collègues de la majorité : quand retrouverez-vous un peu de dignité ?
Oui, pourquoi le chef de l’Etat peut nous envoyer un machin aussi mal fichu ? Avec une étude d’impact truquée ? Un texte à trous, avec vingt-neuf ordonnances, vingt-neuf ! ? Pourquoi le caprice d’un prince prend force de loi ? Parce qu’il sait que vous êtes là, chambre d’enregistrement des désirs du président. Que vous serez là comme des carpettes, à voter n’importe quoi, les yeux fermés.
Oui, souvenez-vous, il y a deux ans, vous promettiez « d’écouter la société civile », et à la place vous la brutalisez ! Vous vous engagiez à « renouveler la politique », et vous voilà les paillassons de Macron !
Alors, je vous en conjure, mes chers collègues, pour vos électeurs, pour votre fonction, pour vous-mêmes : retrouvez-vous un peu de dignité, et de liberté !