Pas un mot de compassion

Dans l’hémicycle, nous nous levons pour des policiers, des pompiers, peu importe l'uniforme. Pour la France en jaune : pas un mot de compassion. Depuis douze moi, pour les Français en jaune, le gouvernement n’a eu que des "silences complices".

Samedi 16 novembre, Manuel, Gilet jaune venu du Nord, intérimaire dans l’automobile, discute place d’Italie avec ses camarades, avec sa femme Séverine, agent hospitalier. D’un coup, Manuel s’effondre. Une grenade lacrymogène lui éclate la tête. Son visage est écrabouillé.

Et il en perd l’œil gauche, éborgné à vie. A vie.

Mardi 19 novembre, le matin, dans un discours, le Chef de l’Etat condamnait les violences du week-end et les « silences complices ». Mais il ne trouvait pas un mot, pas un mot de compassion, pas un mot de pardon, pas un mot de simple regret, pour Manuel, éborgné à vie.

Le mardi après-midi, le gouvernement est interrogé, et à nouveau, nous entendons charabia et langue de bois, mais toujours pas un mot, pas un mot de compassion, pas un mot de pardon, pas un mot de simple regret, pour Manuel, éborgné à vie.

Comme si, pour vous, en revêtant l’affreux Gilet jaune, on était exclus d’une commune humanité. Comme si on n’appartenait plus au peuple français. Comme si, pour parler comme le préfet de Paris, nous n’étions plus du même « camp », le camp de la République. Comme si on pouvait les mutiler sans se mutiler soi-même.

Depuis un an, on compte 25 éborgnés comme lui.
5 mains arrachées.
316 Blessures à la tête.

Et pour eux, depuis douze moi, pour eux tous, le gouvernement n’a eu que des « silences complices ». Nous n’avons pas entendu les mots, les mots de compassion, les mots de pardon, les mots de simple regret, les mots qu’il faut pour réconcilier la France avec elle-même, les mots pour qu’une cicatrice ne déchire pas le pays en deux « camps ».

Sur nos bancs dans l’hémicycle, nous nous levons, et sans hésiter, pour des policiers, des gendarmes, pour des pompiers, pour des militaires, et peu importe l’uniforme : ils sont Français. Quand est-ce que votre gouvernement se lèvera pour ces Français en jaune ? Pour ces éborgnés ? Pour ces mutilés ? Juste parce qu’ils sont Français ? Juste parce qu’ils aspirent, comme nous, en une France plus juste ? Aussi monsieur le Premier ministre, pouvez-vous avoir un mot, juste un mot de compassion, un mot de pardon, un mot de simple regret, pour Manuel, éborgné à vie ?

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