Assange : quand la France est grande ?

On attend ça, la voix de la France, une voix d'indépendance et de résistance, pour Julian Assange. La France se grandirait à l'accueillir. Mais elle s’aplatit. Vous choisissez la voie de la honte.
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DG Assange

Quand la France se grandit ? Quand sommes-nous fiers de notre pays ? La France se grandit, à mon avis, quand elle fait résonner son non face à l’ordre mondial. Face à un ordre injuste, nous sommes fiers d’elle, fiers de nous quand elle fait entendre sa voix, sa voix d’indépendance et de résistance, même face aux superpuissances.

Nous sommes fiers, c’est notre source, notre fondation, nous sommes fiers de la France de 1789 qui affronta toutes les monarchies, toutes les tyrannies rassemblées. Nous sommes fiers du non posé par le général de Gaulle un certain 18 juin, face à une Europe nazie.

Nous sommes fiers du non de Dominique de Villepin, du non de Jacques Chirac à la guerre en Irak. Nous sommes fiers encore du non lancé par le peuple aux Français un 29 mai. Non à la concurrence libre et non faussée.

Voilà ma France.

La trahison de la France

Quand, en revanche, avons-nous honte ? Nous avons honte quand la France se courbe, quand la France s’aplatit, quand la France se rétrécit, quand on la fait cocu et qu’elle dit merci, nous avons précisément il y a dix ans.

Qu’apprend-on alors ? Qu’apprend-on grâce à Edward Snowden et à Julian Assange ? Que la NSA, la National Security Agency, les grandes oreilles américaines ont écouté, espionné durant des années trois Présidents français Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande, plus des ministres de l’Economie, plus une surveillance massive : 70 millions d’enregistrements téléphoniques.

Comment Paris réagit alors ? En ne réagissant pas. « Il faut qu’on garde la mesure de tout cela, déclare Stéphane Le Foll, alors porte-parole du gouvernement. On n’est pas là pour déclencher des ruptures diplomatiques. Il y a trop de liens. » Avant de s’envoler vers Washington pour y discuter du grand marché transatlantique.

Et François Hollande s’est montré presque content. « Le président Obama, dans le coup de téléphone que j’ai eu avec lui, m’a confirmé que la présidence de la République ne faisait plus l’objet de ciblage. »

Le Monde conclut alors : « L’avenir dira peut-être un jour pourquoi Paris est resté si discret. » L’avenir a juste confirmé notre lâcheté. Car quoi ? La France est surveillée par un allié jusqu’à l’Elysée, mais nous ne prenons aucune mesure de rétorsion.

Nous n’avons aucun sursaut d’orgueil, de fierté. Nous ne faisons rien pour imposer le respect. Cette France oui cette France qui se laisse piétiner. Elle me fait honte. Et pire, pire encore. Quel secours ? Quelle protection apporte notre pays quand Edward Snowden et Julian Assange sont poursuivis, pourchassés, traqués par nos amis américains ?

Aucun, aucun secours. Aucune protection, jusqu’à la comédie, le 3 juillet 2013, un jour de la honte. La France a refusé que Evo Morales, le Président bolivien, survole notre territoire. Pourquoi ? Car cet avion était soupçonné de transporter Edward Snowden. Mesure-t-on notre lâcheté?

Et pour Julian Assange, donc, pour Julian Assange, enfermé depuis dix ans quelles mains avons-nous rendu ? Aucune. Rien. Pas un geste. Pas un geste pour l’homme qui a révélé notre espionnage général.

On doit accueillir Julian

Car on peut, on doit accueillir Julian Assange pour les Droits de l’homme, pour les droits d’un homme jamais jugé, jamais condamné, pourtant prisonnier.

Le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Nys-Mazure, écrit, je le cite : « Julian Assange doit à présent être libéré, immédiatement réhabilité et indemnisé pour les abus et l’arbitraire auquel il a été exposé. On peut, on doit accueillir Julian Assange pour les droits de la presse et comme reporter, j’y suis attaché. »

Quel est le seul crime que Julian Assange ait commis ? C’est d’avoir divulgué des vérités, notamment sur les guerres américaines en Irak et en Afghanistan. C’est comme journaliste qui a suscité la colère de Washington. C’est comme lanceur d’alerte qu’il risque une extradition avec à la clé 175 années de prison.

Mais pour accueillir Julian Assange, un autre motif ici dans l’Assemblée nationale, devrait nous tenir à cœur à nous, Français. Il est patriotique. Nous devons l’accueillir pour nous, ne serait-ce que par orgueil, pour services rendus à la nation.

Nous devons l’accueillir pour la France, pour notre pays, pour choisir le chemin de la liberté plutôt que de la honte, pour choisir la liberté plutôt que la servilité. Comme l’énonçait André Malraux : « Le mot non fermement opposé à la force possède une puissance mystérieuse qui vient du fond des siècles. Toutes les plus hautes figures spirituelles de l’humanité ont dit non à César. L’esclave dit toujours oui. »

Et vous, vous allez encore dire oui, vous allez encore vous cacher derrière des grands principes, derrière des motifs techniques, derrière des prétextes juridiques, derrière des belles phrases comme quoi vous apportez tout votre soutien.

Mais vous allez vous en laver les mains. Vous allez jouer les Ponce Pilate. Vous n’allez adresser aucun signe de désaccord, de refus au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, vous allez choisir la voie de la honte, le chemin de la servilité.

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