« Je fais les pâtisseries dans le labo du supermarché. Comme j’habite un petit village à la campagne, c’est lever à 3 h 45. Et ensuite, toute la journée debout, dans le froid. Je sors à 11 h, 11 h 30. Et ça, six jours par semaine…
– Six jours ?
– Oui, six jours, du mardi au dimanche. »
Des salariés m’avaient déjà raconté ça, six jours, dans l’entretien, chez les auxiliaires de vie, mais je regardais ça comme des anomalies. Je me disais : « C’est parce qu’elles sont multi-contrats », ou un truc comme ça. Mais sur le rond-point de Soissons, Alice m’assurait que non :
« Dans ma semaine, je n’ai qu’un jour de repos par semaine, le lundi.
– Mais dans la loi, c’est pas deux jours de repos obligatoire ?
– Je sais pas. »
Un délégué de Carrefour traînait l’oreille : « Dans la loi, oui. Mais depuis El Khomri, la Loi Travail, et encore pire Macron, maintenant, les accords de branches, ou d’entreprises, peuvent déroger à la loi.
– Ah oui ! Je me souviens, c’est l’inversion de la hiérarchie des normes !
– C’est ça.
– Et donc, vous, c’est six jours sur sept à trois heures du matin ?
– Oui, et c’est pas pour me plaindre, bien sûr qu’il y a pire, mais c’est dur.
– Vous faites quoi, en rentrant le midi ?
– Ben, je fais pisser le chien ! (Rires.) Et après le repas, y a la sieste, mais à 20 h je suis couchée. »
Les macronistes, c’est leur nouveau refrain, à la télé : « Dans ce conflit, il n’y a pas que la question des retraites, mais tous les problèmes de travail, le respect du travail, la santé au travail, le travail des séniors… »
Mais qui, depuis quarante ans, qui depuis dix ans, qui écrase le travail ? Qui le méprise dans les faits ? Qui en organise la maltraitance ? Macron et ses pairs, et ses pères. Macron qui, à l’Elysée déjà, murmurait à l’oreille droite de Hollande. Macron à Bercy. Macron qui, à peine élu président, a comme priorité de fragiliser les salariés.
Cette « France d’en haut », à l’Assemblée, dans les éditos, qui par leurs lois, leur « compétitivité », leur « flexibilité », durcissent la vie de toutes les Alice du pays. Qui les mettent au boulot même le dimanche. Qui réduisent pour elles les respirations, qui rétrécissent la vie de famille, sportive, associative, religieuse. Qui en gèlent les salaires. Et qui prétendent maintenant, en même temps, « respecter le travail ».
Ils me dégoûtent.
Vivement un gouvernement pour les Alice !