L'histoire s'accélère
Hier, Ariane Chemin, du Monde, était convoquée par la DGSI pour ses articles sur l’affaire Benalla, entendue pour « atteinte au secret de la défense nationale ». Mediapart avait fait l’objet d’une perquisition avortée. La DGSI, toujours, dans les ventes d’armes au Yémen, a auditionné Mathias Destal et Geoffrey Livolsi, du Disclose, et Benoît Collombat, de Radio France. Autant de démarches judiciaires réclamées par le pouvoir : Matignon, le ministère des Armées ou l’Elysée. Le journaliste Gaspard Glanz est interpellé dans une manifestation, mis en garde à vue, déféré, fiché S. Comme le note Jean-Marie Delarue, le président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, cette arrestation s’inscrit « dans un contexte plus général de restriction des libertés fondamentales ». Durant le mouvement des Gilets jaunes, Reporter sans frontières a recensé 88 incidents majeurs à l’endroit de la presse :
"En plus des journalistes blessés, cette catégorie comprend notamment des cas de destruction de matériel, d'intimidations sévères, de journalistes clairement identifiés 'Presse' visés par des canons à eau, des tirs de LBD, ou repoussés violemment à coups de bouclier."
Trier la vérité
Mais cette emprise est également, ces derniers temps, passée par de nouvelles lois.
Une loi contre les « fake news ». Comme si c’était au pouvoir de trier la vérité et les mensonges. Comme si, surtout, le gouvernement, et le président, n’étaient pas les premiers émetteurs de fake news (« Il est faux de dire que l’Arabie saoudite est un grand client aujourd’hui de la France dans quelque domaine que ce soit », « il ne faut pas dire que le chlordécone est cancérigène », « Ici, à la Pitié-Salpétrière, on a attaqué un hôpital », etc.).
Une loi sur le secret des affaires, fabriquée à la demande des géants de la Chimie (Monsanto, Dupont de Nemours…). Toute information sur les firmes, quasiment, peut rentrer dans le champ de ce texte : un plan social à venir, des documents comptables, une étude épidémiologique… Qu’on laisse les multinationales tranquilles !
Assurer la liberté de la presse et son honneur
Enfin et surtout : le contrôle de l’info, c’est évidemment la mainmise, par dix super-riches, Drahi, Niel, Bolloré, etc., sur le capital des médias. Parce qu’à la fin, on peut baratiner, mais c’est toujours le propriétaire qui décide : qui paie l’orchestre choisit la musique.
Notre but, en la matière, ne varie pas : libérer les journalistes de leurs médias – une cage de verre que, parfois trop bien domptés, ils ne ressentent pas. Assurer « la liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l’égard de l’Etat, des puissances de l’argent et des influences étrangères », comme nous y invite le programme du Conseil national de la Résistance. Démocratiser la presse, donner le pouvoir aux Sociétés de journalistes, mêlé à des Sociétés de lecteurs, d’auditeurs, de téléspectateurs.
Bref, y a du boulot…