Vous m’avez élu il y a trois ans. Merci encore. Depuis, à quoi je vous sers ? Je m’interroge, bien sûr. Les propositions que je fais sont enterrées par la majorité. Les rapports que je rends, le gouvernement s’assoit dessus. Quand je cause dans l’hémicycle, ça ne fait jamais changer d’avis un ministre… Sur mes 3237 amendements déposés, 9 ont été adoptés, d’après le site nosdeputes.fr. Ça fait un taux de 0,27% : mon hyperactivité n’est guère récompensée… Vu comme ça, le bilan n’est pas glorieux.
Quand même, quand même. D’abord, très concrètement, y a des dossiers qu’on démêle, qu’on aide à pousser dans les administrations : pour des demandes de formation, de logement (énormément), d’aides pour les commerçants, de soutien pour des enfants handicapés, de titres de séjour, etc. Mon équipe, à Amiens, à Abbeville, fait ce qu’elle peut. Mais je vais dire la vérité : sans doute que là-dessus, vous trouveriez des députés qui font mieux, qui ont des relations, du piston.
J’espère vous servir à autre chose, à vrai dire, de moins concret, de moins matériel, mais l’homme, la femme, ne sont pas que des tas de viande, bon sang ! J’espère porter à Paris vos voix, vos vies, vos visages. J’espère que vous vous sentez représentés, que quelqu’un parle là-haut pour vous (et peut-être un peu comme vous). J’espère, tout simplement, que vous ne vous sentez pas trahis, comme d’habitude, comme si souvent depuis trente ans. C’est même pas être d’accord avec moi. Des fois vous l’êtes, des fois vous ne l’êtes pas. C’est pas le souci. Juste que des convictions soient défendues, avec franchise, une confiance qui s’instaure. Bref, j’espère vous servir à espérer, un peu.
Et vous, à quoi vous me servez ? À ne pas me décourager non plus. Je sais, moi, qui je représente, pour qui je parle. Vos voix, vos vies, vos visages, de Géraldine agente d’entretien, de Annie auxiliaire de vie sociale, de David cheminot, de Farida caissière, etc., je les ai à l’esprit. Et c’est ça, c’est vous, qui me donnez le courage de faire l’effort, encore, de me bagarrer. Pour quoi faire ? Parce que, comme l’a dit Emmanuel Macron : « Notre pays repose tout entier sur des femmes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal. » Et qu’on ne compte pas sur lui, sur les siens, pour changer ça, à nous de nous en charger. C’est long, c’est fatigant, c’est difficile, mais : À la fin, c’est nous qu’on va gagner !