Merci patron ! Happy end après le happy end

Un conte de fées chez les chtis.

Le week-end dernier, Jérémy Klur s’est marié, le fiston de Jocelyne et Serge, les héros malgré eux de Merci patron ! Sur le faire-part que j’ai reçu, ce printemps, sa future femme Charlotte et lui avaient l’air radieux, sur une plage, décoiffés par le vent. C’était une bonne surprise. Je ne m’y attendais pas. Un happy après le happy end.

A l’époque du tournage, Jérémy paraissait fragile, tantôt en galère pour un stage, tantôt en emploi aidé à la déchetterie. Je le voyais, je le craignais, enfermé dans un destin trop étroit, enfermé chez ses parents, enfermé par la pauvreté. J’avais pris sa place à l’écran, durant quelques heures, quelques jours, quelques semaines, et ce fut mon meilleur rôle, une période rocambolesque, carnavalesque, et qui me laisse bien sûr de la nostalgie. Qui nous a laissé, à nous tous, à tous les acteurs, des souvenirs très forts.

Aussi, ce samedi, avec ma fille (qui s’était acheté une robe exprès), je me suis rendu aux noces, à Forest-en-Cambrésis. J’y ai retrouvé, devant la mairie, Marie-Hélène, la militante cégétiste, communiste, héroïne pas malgré elle de Merci patron ! Elle faisait la bise à la belle-famille, à la femme de Robert, Robert Lacombled, un coco du coin, « qui vendait Liberté tous les vendredis à la porte de l’usine ». Une génération bercée là-dedans, dans le Parti, dans le rouge. Et maintenant ? La circonscription est passée au Rassemblement national, dès le premier tour.

Les mariés se sont fait attendre, le temps de papoter avec les invités.
« Jérémy, c’est mon chef, en quelque sorte. Moi, je m’occupe des écoles…
– Vous êtes Atsem ?
– Oui, en gros à mi-temps. Et après, je fais le ménage dans les bâtiments de la commune. J’ai de la chance, maintenant, j’habite à cinq minutes de mon travail. »

Jérémy était donc passé « chef ». Eux sont enfin arrivés, dans une vieille voiture, une traction avant. Jérémy en est sorti, une barbe longue, qui lui avait poussé durant l’été. Il a ouvert la porte de la mariée, bien droit, l’air sûr de lui. Et c’est sûr de lui que, ensuite, il a répondu « oui ». Charlotte aussi.

Entre la mairie et l’église, la question a fusé : comment s’étaient-ils rencontrés ? « On est tous les deux de Forest, à quelques rues près. Moi, j’ai toujours été amoureux d’elle, mais elle avait des copains. Quand elle est revenue en service civique à l’école, c’est là qu’on s’est rapprochés… »

Peut-être parce que ça me fait peur, peut-être parce que je tremble devant, mais où mon Jérémy, le Jérémy d’avant, avait-il trouvé le courage pour affronter l’amour ? D’où lui était venue cette confiance ? Il nous l’a raconté, à grand trait, au vin d’honneur.

« C’est le boulot. C’est le boulot qui a tout changé. D’abord, j’ai travaillé chez L., au magasin de matériaux, et j’ai donné, donné, bien plus que mes heures. Je me suis fait un accident du travail, à la jambe, et après ça, il était toujours sur mon dos. J’en étais mal, malade. Je n’en pouvais plus, ça me mangeait le cerveau. Après ça, j’ai trouvé un petit contrat à la commune, ici. Dominique, c’était un ancien, à l’entretien, il m’a bien encadré. Et quand il est parti à la retraite, le maire, le conseil municipal m’ont embauché. Ici, je suis bien. C’est ça qui a tout changé. »

C’est une forme de bonheur simple, que j’apprécie. Un métier près de chez soi, où l’on se sent utile. De quoi fonder une famille, un foyer, prendre un crédit, bâtir sa maison. Passer chez ses parents, avec Jocelyne qui l’attend à midi pour le café, avec un chocolat, Serge aussi…

Un conte de fées chez les chtis : « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. »

Partager :
Pour me soutenir... faites un don !

Ils sont indispensables notamment pour payer des salariés et des locaux de travail, organiser des événements, acheter du matériel, imprimer des affiches, des tracts… Ils nous aident à financer mon action politique et celle de Picardie Debout !