Que les hôpitaux français achètent français

François Ruffin interpelle Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie sur la situation de l’entreprise Carelide, fleuron français garant de notre souveraineté sanitaire et actuellement en redressement judiciaire. Il lui demande une chose simple : que les hôpitaux français achètent français.

« Est-ce que vous avez vu le ministre de la Santé ?
– Personne.
– Le ministre de l’Economie ?
– Personne.
– Le ministre de l’Industrie ?
– Personne.
– Le président de la République ?
-Oh non, il est bien loin de nous, lui… »

Meryam est ouvrière chez Carelide, à Mouvaux, dans le Nord. Avec 450 salariés et 130 intérimaires, c’est la seule usine française qui fabrique des poches à perfusion de paracétamol. Elle risque de fermer, ou de péricliter.

Pourquoi ? Parce qu’elle peine à trouver un repreneur sérieux, c’est la raison apparente, réelle. Mais qui cache une cause : les hôpitaux français n’achètent pas français. Pour quelques centimes près, appels d’offre oblige, ils préfèrent les produits américains ou allemands : 70% du marché hospitalier va aux entreprises étrangères, seulement 30% à cette société tricolore.

Et pourtant. Et pourtant, l’Etat a donné à Carelide cinq millions d’euros pour investir dans des robots. Je les ai vus : ils sont à l’arrêt ! Autant d’argent du contribuable gaspillé.

C’est la même histoire que pour le masque. Oui, l’Etat a versé des millions d’euros, des dizaines de millions d’euros, pour de nouvelles machines, de nouvelles usines. Mais la moitié, déjà, ont fermé : sur les trente qui existaient, quinze ont cessé leur activité. Et les autres ne tournent plus qu’au ralenti. Ainsi, à Frontignan, dans l’Hérault, les ouvriers ont remis la chaîne en route mais « juste pour vous, juste pour votre venue, sinon on est à l’arrêt ». Et pourquoi ? Le propriétaire, par ailleurs président de la Fédération Française du Masque, me l’expliquait : « La France achète chinois. On reçoit beaucoup de compliments ! La préfecture, le département, ils sont très fiers de nous. Les parlementaires, le maire, ils sont tous venus visiter. Mais derrière, les hôpitaux, les pompiers, les lycées, même le ministère de la Justice, ils achètent à l’étranger. Et pourtant, l’État nous a subventionnés ! »

Il est temps d’en finir avec ces âneries.
Oui, vous êtes des ânes.
Nous sommes des ânes.
La France est un âne.
L’Europe est un âne.

Que font les Américains ? Le Buy American Act. Et ils mettent aujourd’hui 400 milliards d’euros pour des mesures protectionnistes, pour que l’industrie prospère dans leur pays.

Nous, que faisons-nous ? Aucun Buy European Act. Aucun Buy French Act. On se veut les meilleurs élèves du libre-échange ! Les premiers de la classe d’une mondialisation qui, depuis quarante ans, détruit notre industrie, écrase les travailleurs, érode leurs salaires.

Et alors que, dans le cœur de la crise Covid, le président de la République déclarait : « Déléguer notre santé, notre protection à d’autres est une folie », a-t-on rompu avec cette « folie » ? Non ! On la poursuit, on la prolonge encore, signant des traités pour mieux déménager le monde en Nouvelle-Zélande, au Chili, au Vietnam.

On dit aux Etats-Unis : « C’est pas bien ! C’est vraiment pas gentil ! C’est pas conforme à l’Organisation Mondiale du Commerce ! » Mais ils s’en fichent, et ils ont bien raison : les Américains défendent leurs intérêts américains. Les Chinois défendent leurs intérêts chinois. Il n’y a que les Européens, les Français, pour ne pas défendre leurs intérêts européens, français.

Cette ânerie – et vous voyez comme je suis poli – cette ânerie doit cesser.

Aussi, Monsieur le Ministre, nous vous demandons de recevoir au plus vite les salariés de Carelide et leurs avocats. Mais surtout : il nous faut un Buy French Act, que les hôpitaux français achètent français ! Tout de suite. D’urgence.

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