Budget de la Sécurité sociale : alerte sur le handicap !

Vont s’ouvrir les débats, en Commission des affaires sociales, sur le budget de la Sécurité sociale. C’est bel et bien le musée des horreurs : le gouvernement, qui s’est refusé à taxer les milliardaires, se rabat sur les « petits » : les apprentis, les retraités, les malades de longue durée, jusqu’aux chèques-vacances des salariés.

Mais à la lecture de ce projet, un point en particulier nous a effaré : les personnes en situation de handicap sont particulièrement ciblées, victimes annoncées de la cure d’austérité. Par de multiples biais :

1/ Le gel de l’Allocation aux Adultes handicapés (AAH) et de toutes les prestations d’autonomie (article 44 du PLFSS). Alors que le montant de l’AAH est de 1033 € par mois et que le taux de pauvreté des personnes handicapées est déjà presque deux fois supérieur à la moyenne nationale (25,8% contre 14,4%)

2/ Le doublement des franchises médicales (annexe 9 du PLFSS), qui ont déjà doublé l’an dernier, et l’extension de ces franchises aux soins dentaires et aux dispositifs médicaux (article 18 du PLFSS) ! Or, qui est le plus touché ? Les malades de longue durée, les personnes handicapées, dont les ressources sont déjà plus maigres, dont les dépenses de santé sont plus élevées (aux alentours de 1 500 € par an pour les frais non-remboursés). Et les choses sont bien faites : l’AAH est juste trop élevée, juste au-dessus du plafond, pour donner droit à la Complémentaire Santé Solidaire…

3/ Pour les travailleurs handicapés, l’AAH ne sera plus considérée comme un revenu professionnel. Avec pour conséquence la diminution, voire la suppression, de la prime d’activité (article 79 du PLF). À titre d’exemple, pour un travailleur en ESAT qui touche 1 285 € (844 € de rémunération ESAT et 441 € d’AAH), les 200 € (environ) de prime d’activité disparaîtraient

4/ Une diminution de 15% du budget de l’insertion par l’activité économique, qui va frapper les budgets des entreprises adaptées, des associations d’insertion, des territoires zéro chômeur. Pourtant, le taux de chômage des personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne nationale : pour elles, comme pour d’autres publics, le « marché du travail » classique n’inclut pas, il exclut

5/ L’Ondam pour les établissements et services pour personnes handicapées qui n’augmentera que de seulement 2,5%, contre les 4% nécessaires demandés par la Fédération Hospitalière de France, ce qui représente un manque de 500 millions d’euros (article 49 du PLFSS). Et des établissements sociaux et médico-sociaux, en charge des enfants en situation de handicap, qui devront se plier à la tarification à l’acte… comme si elle avait donné de merveilleux résultats à l’hôpital ! (article 36 du PLFSS).

6/ Et, pour clôturer en beauté, le ministère en charge des Personnes handicapées annonce que les contrôles des MDPH seront renforcés pour l’attribution de l’AAH. Comme si obtenir cette allocation relevait du loisir ! Comme s’il manquait d’examens à passer, de formulaires à remplir ! Mais c’est un marqueur : ce budget doit diminuer.

Ce que nous décrivons ici, c’est un recul comme jamais : ces dernières décennies, la reconnaissance du handicap a progressé dans la société. Avec pareil budget, ce serait une cassure, une grande marche arrière, déjà entamée de façon pernicieuse, silencieuse, depuis quelques années, mais qui franchirait un cap. 

Enfin, comme toujours, le gouvernement se tait sur un point : plus de 100 000 inaptitudes au travail sont enregistrées chaque année. Le double d’il y a dix ans. C’est comme si toute l’industrie automobile disparaissait tous les ans ! Avec des salariés broyés, brisés, physiquement ou psychiquement, via des troubles musculo-squelettiques et des burn-out. C’est un coût humain. C’est aussi un coût pour l’économie de notre pays, évalué à plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Que fait le gouvernement contre ce gâchis ? Contre cette fabrique de personnes handicapées, de malades longue durée en série ? Rien. 

Au contraire, les troubles psychiques ne figurent toujours pas dans le tableau des maladies professionnelles. Le grand patronat peut continuer à produire des dégâts. 

Au contraire, le gouvernement prévoit une réforme du dispositif de reconnaissance des maladies professionnelles qui risque d’augmenter le nombre de décisions de rejet (article 39 du PLFSS).

Au contraire, le gouvernement veut réduire les indemnités journalières pour les arrêts de travail des personnes victimes d’affections de longue durée (non exonérante) (article 29 du PLFSS).

Au contraire, les indemnisations perçues après des accidents seront déduites de la Prestation compensatoire du handicap !

Contactées, les associations du handicap jugent « ce cumul de mesures visant les personnes en situation de handicap à la fois historique et dévastateur ».

La bataille du budget continue à l’Assemblée, pour empêcher ce carnage.

François Ruffin et Sébastien Peytavie

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