Macron / Uber : un pacte sur le dos des travailleurs ?

François Ruffin interroge le Premier ministre sur le sort réservé par la France à la directive « travailleurs des plateformes » : êtes-vous encore et toujours à la solde d’Uber ?

« Je n’ai pas accès aux droits sociaux, au chômage, aux congés payés, aux accidents de travail, au congé maladie. On est payé à la course 4,42 euros, qu’elle fasse 100 mètres ou 10 km. La situation est dramatique pour tous les travailleurs des plateformes en Europe. On est payé à la pièce. Dans tous les pays, il y a une stratégie des plateformes à faire du dumping social, à baisser la rémunération et à ne pas payer les droits sociaux. »

Depuis dix ans, Camille, comme de nombreux livreurs de repas et chauffeurs VTC, se démène dans toute l’Europe pour alerter les pouvoirs publics et les médias. Quelques centaines de David face à aux Goliath 2.0 que sont Uber, Deliveroo, Amazon…

Durant ces deux dernières années, au Parlement européen, la députée européenne Leïla Chaibi a endossé leur combat. L’objectif : faire adopter la directive « travailleurs des plateformes ». Au cœur du texte, un principe simple : la présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes, déguisés en indépendants.

Le 13 décembre dernier, le Parlement, la Commission et le Conseil européens, sont tombées d’accord, dans le cadre d’un accord de trilogue. Un avant-goût de victoire pour 28 millions de travailleurs et de travailleuses.

Il ne restait qu’une marche à franchir : le Conseil des États membres devait se prononcer en faveur de la directive.

Et c’est la France qui a finalement bloqué son adoption, le 16 février dernier.

La déception est grande pour les travailleurs ubérisés. Mais aussi pour le commissaire européen aux Droits sociaux, Nicolas Schmit à l’origine du projet : « Il est profondément décevant que les États membres de l’UE n’aient pas été en mesure de voter. »

Et jusqu’à la Présidence belge du Conseil de l’Union européenne, qui a décidé de ne pas laisser tomber ce combat pour un « progrès important ».

Monsieur le Premier ministre, pourquoi la France a-t-elle posé son véto ?

Pourquoi empêchons-nous le « progrès », pour nous et pour nos voisins ?

Est-ce parce que le président Emmanuel Macron entretient des liens privilégiés avec la multinationale Uber ?

On sait depuis les Uber Files qu’Emmanuel Macron a aidé Uber à s’implanter en France lorsqu’il était ministre de l’Économie entre 2015 et 2017.

On sait qu’il a participé à des rencontres secrètes avec son directeur Travis Kalanick.

Emmanuel Macron avait alors déclaré : « Je le referais demain et après-demain. ».
On sait que des dirigeants d’Uber ont financé la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron. D’après Mark MacGann, l’ancien lobbyiste d’Uber, « Nous étions nombreux [chez Uber] à être séduits par ses promesses, sa fraîcheur, son dynamisme mais aussi par son projet. »

Est-ce donc pour défendre les intérêts d’Uber qu’Emmanuel Macron a torpillé la directive « travailleurs des plateformes » ?

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