« Vous déchirez la France »

Vous avez déchiré le contrat social. Vous vous êtes assis dessus. Vous l'avez piétiné. Et c'est la France que, aujourd'hui, vous déchirez.
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Voici donc, Monsieur le président, votre budget de la honte.Voici votre budget de la colère.

Ce fut, l’année dernière, votre geste inaugural, votre entrée en matière : pour vos amis millionnaires, vous avez supprimé l’Impôt de Solidarité sur la Fortune.
C’était une promesse de campagne, pour la financer, justement, votre campagne. J’en ai recueilli le témoignage : que garantissiez-vous à vos généreux mécènes, à tout bout de champ, d’un dîner lucratif au suivant ?

La fin de l’ISF. En échange, les financiers vous signaient à tire-larigot des chèques de 7 500 €. Dès votre entrée à l’Elysée, vous teniez cet engagement, et assuriez à vos donateurs un retour sur investissement.
Avec l’ISF, mais pas seulement. Avec également la flat tax. Avec aussi la taxe sur les hauts salaires effacée. Avec encore une ristourne « spéciale Brexit » pour les banquiers. Avec enfin une baisse de l’impôt sur les sociétés.

A vos copains et coquins, vous avez distribué les milliards, les yeux fermés, sans compter.

Et en même temps, en même temps, dès qu’on vous parle del’hôpital abandonné, des EHPAD sous-dotés, des élèves handicapés, des tribunauxengorgés, des commissariats délabrés, dès qu’on plaide pour la santé, pour l’éducation,pour la police, pour la justice,
vous répondez : « déficit public ». Vous brandissez ce spectreterrifiant : « Quelle dette allons-nous laisser à nos enfants? »
Hypocrite que vous êtes ! Charlatan de l’endettement !
Elles sont bien sélectives, vos pudeurs de père-la-rigueur.

En même temps, en même temps surtout, pour enrichir les riches, comment avez-vous procédé ? Vous avez appauvri les pauvres,
ou les modestes. Vous avez gratté cinq euros sur les APL des locataires, vous avez éliminé 240 000 contrats aidés,
vous avez relevé la CSG des retraités.
Il fallait oser.
A ce point, il fallait oser.

Une injustice aussi évidente, aussi criante, il fallait oser.
Mais vous osez tout, et c’est à ça qu’on vous reconnaît.

Cette année, vous pouviez corriger le tir.
Vous pouviez rectifier votre budget.
Au contraire, vous creusez le même sillon, le sillon de l’injustice : pour les pauvres, ce sera le gel des pensions, des allocations, et cette taxe sur l’essence. Pour les riches, pour leurs firmes, ce sera la suppression de l’exit tax, et le CICE doublé.

C’est si excessif, tellement abusif.
Ca touche au porte-monnaie, certes, au « pouvoir d’achat », mais pas seulement.

C’est l’orgueil d’un peuple qui en est blessé, son honneur : on se moque de lui, son propre chef de l’Etat se moque de lui. Car à cette injustice, à cette évidence de l’injustice, comme on jette du sel sur une plaie, vous ajoutez l’arrogance de l’injustice, à grand renfort de « gens qui ne sont rien », de « feignants », de « Gaulois réfractaires », de « vous n’avez qu’à traverser la rue » et autres « pognon de dingue », comme des provocations renouvelées.

Vous avez déchiré le contrat social.
Vous vous êtes assis dessus.
Vous l’avez piétiné.
Vous en avez fait des confettis.
Et c’est la France que, aujourd’hui, vous déchirez.

Avant même votre élection, à la veille du second tour, je vous adressais – je cite – une « Lettre ouverte à un président déjà haï » :

« Vous êtes haï, je vous écrivais, vous êtes haï, vous êtes haï.
Je vous le martèle parce que, avec votre cour, avec votre campagne, avec la bourgeoisie qui vous entoure, vous êtes frappé de surdité sociale. Vous n’entendez pas le grondement : votre heure, houleuse, sur le parking des Whirlpool, n’était qu’un avant-goût. C’est un fossé de classe qui, face à vous, se creuse. »

Avec douze fois « vous êtes haï » en une trentaine de lignes, je vous prévenais avec un rien d’insistance. Et stylistiquement parlant, je ne porte pas ce texte en bandoulière, comme une fierté littéraire. Sur le fond, néanmoins, je n’en renie rien, l’avertissement sonnait juste:

 Vous êtes aujourd’hui haï, massivement haï.
C’était en germe hier, on assiste désormais à la moisson. Le fossé s’esttransformé en gouffre.

Vous l’avez palpée par vous-même, cette haine, de la Lorraine aux Ardennes, de la Marne à la Somme, lors de votre semaine d’ « itinérance mémorielle ». Vous avez fait le jovial, « j’aime aller au contact », « je reviendrai plus souvent », mais ce ressentiment, dans votre propre peuple, a bien dû vous meurtrir.
Et je l’espère : vous alerter
Depuis dix jours, surtout, qu’est-ce qui rassemble les « gilets jaunes » ? Qu’est-ce qui les unit, bien plus que le gasoil ? Qu’est-ce qui, par-delà mille différences, leur fait un trait commun ?
Vous.
L’aversion que vous provoquez.
L’aversion que votre caste provoque.
Quel slogan entonne-t-on, sur les ronds-points, à peine un micro tendu ? « Macron démission ! Macron démission ! »

Comment,dès lors, sortir de cette impasse ?

Voici le discours que je vous propose, pour demain soir :

Françaises, Français,
Je vous ai entendu.
Je vous ai compris.
J’ai changé.
J’en ai pris conscience, soudain, cette nuit, une révélation.
Je me suis trompé :
La politique ne se fait pas au CAC 40.
Nous devons mener la transition écologique.
Nous devons la mener avec l’exigence de justice sociale.
Nous devons la mener avec un renouveau démocratique.
C’est une rupture dans mon quinquennat.
C’est un nouveau chemin, que nous ouvrons pour le pays.
Voilà la feuille de route que, dès ce soir, je confie au Premier ministre, à tout le gouvernement.

Ce serait un changement de cap.
Et voici les trois mesures que, dans la foulée, d’urgence, j’annoncerais pour recoudre la France :

Première mesure.
Rendez l’ISF d’abord !
Traquez la fraude fiscale sans pitié, tous les yachts immatriculés à Malte, tous les jets privés à Jersey, tous les Google Apple Facebook Amazon que vous recevez avec les honneurs à l’Elysée, tous vos amis qui optimisent, qui panamisent, qui caïmanisent,
qui luxembourgisent.
C’est un poison.
C’est un poison pour la société, ces 60, 80, 100 milliards enlevés au fisc.
C’est un poison, pas seulement pour les finances, mais surtout, surtout, pour le moral de la nation.
Comment croire au bien commun quand les privilégiés, les PDG, les premiers de cordée, que vous donnez en exemple, trichent, volent, s’affranchissent de la loi commune ?
C’est tous les Français qui en sont écoeurés, dégoûtés, découragés.

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