Ehpad : quand Denis pourra-t-il refaire du vélo ?

Monsieur Véran, j'aurais bien d’autres choses à vous rapporter, sur les budgets, les plannings, les primes, etc., mais je pare au plus urgent : quand Denis pourra-t-il reprendre son vélo ? On ne saurait sauver des vies en sacrifiant notre humanité.

M. François Ruffin interpelle M. Olivier Véran, ministre de la Santé : quand Denis pourra-t-il refaire du vélo ?

Ce lundi, j’ai visité l’Ehpad de Domart-en-Ponthieu. Et je voudrais simplement vous alerter, humainement, sur la détresse psychique, affective, des résidents :

« Ce matin encore, relatait une soignante, Denis a parlé de se jeter par la fenêtre. Il veut aller faire du vélo, boire un coup au troquet du coin, comme il faisait avant. Là, il a l’impression d’être en prison. C’est pareil pour Jacques : normalement il fume vingt cigarillos par semaine, maintenant c’est vingt par jour. Nos personnes âgées, ou handicapées, avaient l’habitude de faire un tour dans le village, elles en sont privées. Beaucoup ont développé des troubles psychopathologiques. Certains confondent le jour et la nuit, d’autres ne mangent plus ».

Je ne suis pas juriste. Mais déjà, pendant le confinement, l’interdiction de sortir de l’établissement, et même de leur chambre, posait un souci de droit : ils ne sont condamnés à rien, n’ont aucune sanction prononcée par un juge, ils sont les égaux des citoyens dehors. On pouvait le comprendre, néanmoins, eux-mêmes pouvaient le comprendre, au vu des restrictions de liberté pour l’ensemble des français. Mais aujourd’hui, ça n’est plus tenable. Après trois mois d’enfermement, ça n’est plus tenable. Au moment où toute la société se déconfine, ce n’est plus tenable pour les résidents, ce n’est plus tenable pour les soignants.

J’aurais bien d’autres choses à vous rapporter, sur les budgets, les plannings, les primes, etc., mais je pare au plus urgent, au plus pressé : quand Denis pourra-t-il reprendre son vélo ?

Post-scriptum : J’ai reçu dimanche ce témoignage, de Thierry :

« Ma mère est décédée le 30 mai 2020, ma maman n’est pas morte d’un coronavirus, ma maman est morte parce que, dans ses derniers moments, on l’a privée d’amour et je suis en colère. Des décideurs cyniques et froids, des exécutants serviles, complices et victimes à la fois, dans leur tour de verre, leur bureau d’acier ont mis en place une machine de guerre pour tenter d’anéantir ce qui fait de nous des humains. Sous de fallacieux prétextes, ils ont réussi à priver nos anciens des dernières attentions, précédant le départ, de ces derniers instants où la conscience réclame une caresse des cheveux, un baiser sur le front, avant l’inconnu. Quand, pour celui qui reste, il devient essentiel de soulager le corps et d’alléger l’esprit ».

On ne saurait sauver des vies en sacrifiant notre humanité.

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