Faut-il abandonner les livres… et le réseau Canopé ?

L'Education nationale vient de lâcher Canopé. Alors Monsieur Blanquer, faut-il abandonner les livres... et les 1531 salariés du réseau ?

M. François Ruffin interpelle M. Blanquer, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse : faut-il abandonner les livres… et le réseau Canopé ?

« AESH et enseignants : collaborer dans une école inclusive », « Autisme et scolarité : des outils pour comprendre et agir », « La famille Tout-Ecran », « Dis-nous Latifa, c’est quoi la tolérance ? »

Ces livres aidaient les enseignants à traiter du handicap à l’école, de la radicalité religieuse, de la laïcité. Ces ouvrages participaient à leur formation, initiale et continue.

J’en parle au passé.

Car votre ministère a décidé d’abandonner le réseau Canopé, et en particulier toute publication. Ce qui, dans votre novlangue, donne : « Ce “recentrage” s’accompagne d’une modification du périmètre des missions et notamment l’abandon progressif de l’édition papier ». Mais où va-t-on ? Où va-t-on si l’Education nationale elle-même délaisse le livre ? Si, se « recentrant » sur le numérique, elle rejoint à son tour « la famille Tout-Ecran » ? Car ces ouvrages, de niche, destinés non au grand public mais aux seuls professeurs, fatalement non rentables, vendus au mieux à mille ou deux mille exemplaires, n’intéresseront jamais les Hachette, Hatier et compagnie.

Au-delà de l’édition, c’est tout le réseau Canopé qui va y passer, les vidéos, les jeux, les ateliers… Les 1 531 salariés l’ont appris par un courriel de leur directeur général, Jean-Marie Panazol, le 19 décembre dernier. Lui-même regrettait la nouvelle et mesurait « les inquiétudes personnelles et le sentiment d’inachevé que certaines peuvent ressentir ». Le 9 janvier, M. Panazol annonçait sa démission.

Et pourtant.

Et pourtant, la Cour des comptes souligne, dans un rapport de juillet 2019, que « Canopé est un acteur clé du service public numérique éducatif » et « a retrouvé son public qui reconnaît l’utilité de ses productions ».

Et pourtant, la commission des finances du Sénat parle, en novembre 2019, d’un « opérateur qu’il importe de pérenniser », appelle à ne pas « remettre en cause les moyens accordés au réseau Canopé » mais que « au contraire, il semble préférable de renforcer cet opérateur pivot ».

Canopé est un bon élève, donc. Il faut dire que ce service a déjà connu une cure drastique depuis 2014, après la fusion du Centre National de Document Pédagogique (CNDP) et de ses déclinaisons locales (CRDP, CDDP, CLDP). Depuis, le « mammouth » a été dégraissé d’environ trois cents emplois, et son budget amputé de 12 % en cinq ans. Dans mon département, la Somme, les antennes d’Abbeville et de Péronne ont disparu. Et voilà donc qu’Amiens devrait suivre : restera-t-il un lieu d’accueil ? De rencontre avec les enseignants ? Ou seulement du « distanciel » ? C’est le grand flou.

« Ça fait 32 ans que je travaille ici, témoigne Aline. Des restructurations, j’en ai connues. Mais celle-ci, c’est de loin la plus violente. On ne sait pas ce qu’on va devenir ».

Alors, Monsieur Blanquer, pouvez-vous répondre à Floriane, Dimitri, Jeanne, Mohammed, Aline, Paolo, Aurélie, Sébastien, Karine, Olivier, Christophe, etc., professeurs détachés, fonctionnaires ou contractuels en CDD, salariés de Canopé Amiens ? Que vont-ils devenir ? Surtout, que va devenir leur mission  ?En ces temps où « l’inclusion scolaire » a la côte dans vos discours, par exemple, qui publiera un guide « Autisme et scolarité : des outils pour comprendre et agir » ?

Pour aller plus loin :
– La page Facebook du Réseau Canopé en Danger
– La pétition pour soutenir le Réseau Canopé

Partager :
Pour me soutenir... faites un don !

C’est pas pour moi, personnellement : vous le savez, je ne garde que le SMIC de mes indemnités parlementaires, mais pour continuer d’organiser des événements, de publier tracts et affiches, de mener la bataille des retraites et les suivantes !