Aéronautique : « Alors, Ruffin, c’est pas trop dur, le grand écart ? »

J’ignore si ces messages proviennent de Macronistes cyniques, ou d’écologistes idéalistes. Oublions les premiers, mais aux seconds je veux répondre – et à ma mère, qui me pose la même question : sur l'aéronautique, pas trop dur le grand écart ?

Vendredi dernier, je me trouvais sur le site Stellia de Méaulte, près de chez moi, aux côtés des sous-traitants de l’aéronautique : AAA, Simra, Figeac, etc.

Avec Julien, délégué CFDT chez Assistance Aéronautique Aérospatiale, on tournait un live Facebook : « La direction nous sort : ‘Y a pas d’argent.’ Alors que les avions, quand même, ça a bien tourné, alors que notre boîte a bien gagné depuis trente ans… »

Ses avocats, Maître Pauline Brocart et Maître Stéphane Ducrocq, témoignaient en direct : « Le plan social est tellement délirant, on ne croyait même pas que ça pouvait exister. Pour le congé de reclassement, ils proposent quatre mois, à 65 % du salaire. Aussi bas, c’est du jamais vu ! Ils disent qu’ils n’ont pas de fonds, ce qui est faux, un rapport démontre que l’entreprise se porte bien.
– Pour vous aussi, derrière le Covid, ils délocalisent ?
– Bien sûr. En ce moment, c’est comme ça sur tous nos dossiers. »

Aussitôt, ça réagissait sur Twitter :

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J’ignore si ces messages proviennent de Macronistes cyniques, ou d’écologistes idéalistes.
Un mélange des deux, sans doute.
Oublions les premiers, mais aux seconds je veux répondre – et à ma mère, qui me pose la même question.

Je suis ici, justement, parce que je m’efforce de marcher sur mes deux jambes, une rouge une verte, sans m’écarteler mais les deux à la fois, aux côtés des salariés, pensant la transition avec eux, et non sans eux, voire contre eux. D’ailleurs, dans la vidéo elle-même, je le mentionne à Julien :
« Comme tu sais, je ne suis pas pro-avion…
– Oui, je sais. »

Mais est-ce une raison pour abandonner, d’un coup, brutalement, sans revenu sans statut, les travailleurs du secteur ? Je ne suis pas davantage amoureux des pneumatiques, qu’ils soient signés Bridgestone, Goodyear ou Continental. Ou des embrayeurs Valéo. Ou des etc. etc. La baisse de ces secteurs, aéronautique, automobile, armement, je la souhaite, pas subite, organisée, sécurisant les salariés, leur offrant un avenir. Et non les laissant entre la « main invisible du marché », qui les broie.

Durant l’entretien, j’ouvre une perspective :

« Bon, je vais partir dans un délire, mais bon… A la Lucas, qui était une firme aéronautique, en Angleterre, dans les années 70, face à des licenciements, les syndicats avaient fait le relevé de toutes les compétences sur le site. Et ils avaient travaillé avec l’Université d’à côté, durant une année, et qui avait rendu un énorme rapport : ‘Avec vos savoirs-faire, vous pourriez convertir en productions d’éoliennes, de pompes à chaleur, de matériel rail-route.’ Je me demande si l’Etat ne devrait pas venir ici, effectuer ce relevé de compétences, offrir des conversions…
– Ce n’est pas du tout du délire, m’appuyait Maître Ducrocq. Ca peut se faire, on appelle ça des
‘CV de site.’ »

Ma place de social-écologiste est ici, dans ce dialogue, dans cette solidarité, dans cette dialectique, dans cette tentative de dépassement des contradictions. Et lors des futures manifs ici, j’espère que les drapeaux verts flotteront parmi les bannières rouges, j’espère que mes camarades de Alternatiba, de ANV-Cop21, de France Nature Environnement apporteront leur soutien sur les piquets de grève, j’espère que d’un côté comme de l’autre on évitera l’entre-soi.

Live Facebook

Suite à ce live, j’ai reçu des messages de salariés de l’aéronautique :

Emmanuel Mahul, cadre chez Latécoère à Toulouse, délégué CGC et trésorier du CSE : « Après de longs mois d’attente a se demander ce qui allait bien nous arriver, ça y est la nouvelle est tombée… Comme vous le savez surement déjà, car annoncé dans la presse, la groupe Latécoère va supprimer 475 postes en France, et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg…

Il me semble, que même si Toulouse est bien loin de votre circonscription, vous pouvez nous aider à mettre dans la lumière ce qui va se passer dans la région Toulousaine. Tous ces emplois sacrifiés au nom de la rentabilité… Pardon, je m’emporte, c’est à cause de la crise sanitaire… »

Poguet Aurélien, élu CGT et secrétaire du CSE de Mécafi à Châtellerault (86) : « Nous subissons actuellement un PSE qui menace la moitié des effectifs de l’usine (242 sur 499 exactement). Nous sommes quasiment mono-client, nous dépendons de Safran à 90%. Nous connaissons vos combats, vos convictions, votre franc parlé et votre proximité avec le monde ouvrier.

C’est pour toutes ces raisons que nous aimerions rentrer en contact avec vous et pourquoi pas envisager votre venue sur nos sites de Châtellerault. »

J’ignore si je pourrai me rendre partout. J’en doute. Mais j’en appelle à mes amis écologistes, c’est maintenant qu’il faut apporter un soutien. C’est maintenant qu’il faut nouer un dialogue, qu’il faut penser, avec les salariés, l’industrie de demain : de quoi avons-nous besoin ?

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